Et eux ?

“La fin de la belle saison” trimballe avec elle la nostalgie d’un été dynamique et insouciant.

Son air frais plane sur des journées encore flamboyantes. Puis, le plus tard possible, tomberont les dernières feuilles. Ne restera alors que l’essentiel. 

Ainsi va la vie.

A l’automne de la leur, quelques mots précieux échangés avec eux.

Rencontre : 

Optimiste et philosophe, Jacqueline, 94 ans, vit en harmonie avec son temps. Elle surfe sur le net et communique facilement par whatsapp ou par facebook avec ses proches. Ses plaisirs ? dessiner, cuisiner, se servir un bon verre de vin.

Jacqueline avait mi-vingtaine quand elle a ouvert le premier salon de coiffure pour dames de son quartier, à Genève. “J’ai tenu ce salon pendant trente ans, avant de le revendre. Ce qui me passionnait, c’était le contact avec les clientes”. Elle s’est ensuite tournée vers la confection-dames, jusqu’à l’âge de la retraite.

“J’ai toujours eu plaisir à embellir les femmes, mais je crois que ce que j’aimais encore plus, c’était de voir la joie dans leur regard.”

Côté vie privée ? Un mari, René, parti il y a vingt ans. “Je l’ai rencontré trois ans après la mort de sa première épouse et nous nous sommes mariés en 1956. Il avait le caractère fort et le coeur sur la main. Avec lui, c’était droit au but, comme au foot qu’il adorait. René aimait les gens et raconter des blagues. Nous avons passé ensemble de magnifiques moments dans la campagne viticole, où nous possédions un mobile home.”

- Quel est votre rapport à la solitude ?

- “Voyez-vous, à force de voir partir les uns après les autres certains membres de ma famille et tous mes amis, j’ai dû apprendre la solitude. D’ailleurs, il ne reste bientôt plus que moi… Parfois je me demande si le ciel ne m’a pas oubliée ?”

Jacqueline a encore ses deux “petites” soeurs - 85 et 88 ans ! - “Toutes les trois, on vit des instants merveilleux : fêtes d’anniversaires au restaurant, confidences, balades. Je prends chaque instant avec mes soeurs comme un cadeau !”

- Vos secrets pour garder cette belle énergie ?

- ”Je suis reconnaissante. Se contenter de ce qu’on a est amplement suffisant pour être heureux, non ? Sinon, j’aime regarder la nature; je me sens toute petite devant elle. Ayant des douleurs, je ne peux plus voyager mais je le fais virtuellement. Notre terre est pleine de beautés, gardons les yeux ouverts.”

- Vous habitez seule dans votre appartement, les déplacements extérieurs deviennent difficiles. Qu’est-ce que vous éprouvez lorsque votre corps vous lâche ?

- “Quand j’étais jeune, je me pensais invincible. Puis, par deux fois, j’ai eu des gros soucis de santé. J’ai aussi dû réapprendre à marcher et je suis restée longtemps à l’hôpital sans bouger… Tout ça m’a aidé à relativiser, à méditer sur les valeurs de la vie et à accepter ce qui nous est donné, la vieillesse y compris. Elle fait partie de la vie.”

- Est-ce que vous vous sentez triste parfois ? “Seulement quand je ne suis pas près du lac. J’adore le lac.”

- Et l’avenir ?  “Je n’y pense pas trop. Je n’ai pas peur de l’avenir, j’ai juste peur de la souffrance.” 

- Quand vous vous retournez sur votre chemin de vie, qu’est-ce que vous vous dites ?

- “Que c’était une autre époque, que c’était bien et que j’ai été gâtée. Je peux dire que j’ai aimé ma vie. Connaissez-vous cette chanson d’Aznavour ? (elle fredonne) “Je vous parle d’un temps que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître… “ La bohème. Qu’est-ce que j’aimerais vous la chanter… Eh bien, cette chanson représente tout ce que je ressens quand je pense à “avant” !”

Une sage devise qu’elle essaie d’appliquer chaque jour et qu’elle aime souffler aux plus jeunes : “Cueille le jour présent sans te soucier du lendemain !”. 

Merci Jacqueline :)

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Alexandra Filliez